Prendre son pied ou retirer le pied? Telle est la question...

Publié le par Zéphine

Il lui semblait beau et bien bâti. Il pouvait soulever avec aisance une femme dans ses bras sculptés tels une statue grecque, pour l’emporter sans défaillir vers tant de promesses délicates et espérées. C'était comme le prélude d'un nouvel espoir, d'un nouvel amour simple et sans accroc. Mignon et amoureux, joyeux et franc, fidèle et stable, en voilà un qui répondait avec brio à toutes les exigences de ces dames. Après sa dernière rupture, il faisait un peu rêver... Et ce jour-là, elle n’avait pas le moral. Et le soir même, elle se laissa aller contre lui.

Puis les jours passèrent... Elle avait pensé le revoir parfois. Mais le temps passait vite et il ne lui manquait pas. Ils se contentaient de parler sur MSN et pour elle c'était bien suffisant : cet unique moment d’intimité qu’ils avaient partagé n'avait pas été fameux.

Lors de cette nuit passée ensemble il lui avait dit, à bout de souffle :

"Avant j'étais plutôt nul au lit. Mais depuis que mon ex m'a quitté je fais beaucoup mieux l'amour. Je ne pratiquais que le missionnaire!".

Si seulement ce n'était qu'une question de position !

C'est sûr, elle avait été ballotée cette nuit-là. On n'est pas un dieu du sexe parce qu'on est endurant et qu'on expérimente les variations du Kamasutra en veux-tu, en voilà ! S’il ne s’agissait que de ça, ce serait à la portée du premier novice venu.

Non, il faut écouter l'autre, être doux, sensuel, érotique, bestial. Se perdre dans les souffles de l'amour, la volupté des chairs, la perversité des sens. Ce n'est pas une leçon à apprendre par cœur ou que l'on expérimente à travers un livre. C'est un art que l'on doit sentir, faire ressentir, et vivre…

Bref, il commença à en avoir marre de cette façon qu’elle avait d'esquiver leurs rencontres et il lui fit savoir clairement. Elle aurait pu l'envoyer promener, après tout elle ne lui devait rien. Mais elle l'aimait bien et elle avait envie d'un peu de compagnie. Elle céda et l'accueillit chez elle.

Il fut convenu qu'il la rejoindrait après le diner. Son enfant à elle était chez son père pour la semaine, ses enfants à lui étaient chez leur mère, rien ne pouvait les empêcher de se voir en tête à tête et de passer un bon moment. Il arriva en tenue de chantier. il émanait de lui une odeur de sueur, une essence masculine qui lui inspira du désir, l’envie d'être prise par cet homme.

Elle but un verre de vin et fuma une cigarette toute seule. "Que c'est chiant un garçon qui ne boit pas et ne fume pas, soupirait-elle. S’il ne fume pas, qu’il boive au moins un verre. Ou alors s'il ne boit pas, qu'il fume des joints ! Un peu d’ivresse que diable, puisqu’on est là pour s’amuser !"

Après un silence gênant entre eux deux, il s’approcha d’elle et la souleva de ses bras forts et rassurants. Portée dans sa chambre telle une princesse, elle ne sut plus trop comment les choses se passèrent une fois là-haut, mais ce qui est sûr, c’est qu’elle ne s’attendait pas du tout à ça…

Elle l'avait apprécié en tant qu'homme, mais pas en tant qu' amant. Elle n'avait pas vraiment envie de lui appartenir. Épuisée par tant d’assaut vif et viril, elle espéra avoir assez donné d’elle et qu’il en fut de même pour lui, pour qu’ils puissent se reposer blottis dans son lit. Mais couché sur le dos, il reprenait son souffle. Apparemment, il n’avait pas été jusqu’au bout de son plaisir. Elle, la tête sur les coussins, et lui, allongé au niveau de ses pieds, ils haletaient tous les deux et récupéraient de ce sport intense.

Soudain, elle sentit un pied froid et rigide, poilu et sans élégance, se glisser dans un endroit humide, quelque part entre ses jambes. Mais que faisait-il? Quel geste incongru et grotesque! Tout le contraire de l'érotisme. Quel manque de sensualité! Quel ridicule! Le malotru avait cru bon de réveiller son désir par ce geste aussi répugnant que disgracieux. Il fallait vite interrompre ce geste. Elle retira ce pied impoli et invita ses mains à lui montrer plus de courtoisie. Mais c'était trop tard, elle avait beau essayer de se concentrer sur le câlin du moment, ce pied infâme revenait sans cesse lui hanter l'esprit et lui refroidir sa libido. L'extase de son copain de jeux déclencha l’alarme de sa libération, et elle s’allongea enfin sous sa couette prête à rejoindre les bras de Morphée.

Lui, s'endormit très vite, mais pour elle la nuit fut longue... Très longue... Fatiguée et installée confortablement contre son oreiller, elle commençait à s'assoupir lorsqu’un bruit sourd et grave la tira de son sommeil : son voisin de lit ronflait si fort qu'il en faisait trembler les murs! Envahit par ce bruit de trompette, elle essaya d’en faire abstraction et de se laisser aller. C'était impossible. Le ronflement était tel que mêmes les voisins devaient être capables de l'entendre, elle l’aurait juré. Alors elle attendit...

Il lui sembla attendre longtemps avant que le petit matin pointe le bout de son nez, et que son voisin de lit se lève pour aller travailler. Et à l'aube, libérée de son geôlier pourtant si gentil, elle put enfin se reposer de cette nuit fatigante, ennuyeuse, et saugrenue...

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